Origine de Pâques détaillée
Les rameaux
Dans la tradition chrétienne, le dimanche des Rameaux est le dernier dimanche de Carême, celui qui précède la fête de Pâques. Et ouvre la semaine sainte. Notre jardinier très intrigué par ces rameaux se penche sur leur nature historique, climatique et botanique… palmier ou buis ?
L'origine des rameaux
Au temps de Jésus, la Pâque juive approche. Le soir, des feux brillent sur les collines de Jérusalem, cette cité curieusement vallonnée. Car en ce moment on célèbre ici comme ailleurs depuis des siècles la grande fête juive qui commémore le départ d'Egypte du peuple hébreu, la liberté, la fin de l'esclavage et la naissance en tant que peuple, l'aide que Dieu a donné à son peuple dans sa fuite. Nous y revenons au sujet de Pâques. On afflue donc de partout vers la capitale, de loin parfois, de l'étranger même, on loge sur place, on chante, c'est la fête. Jésus a logé à proximité, car c'est l'occasion pour lui de rencontrer une grande foule.
Jésus a fait chercher à ses disciples une mule, afin d'entrer facilement dans Jérusalem où il se sait attendu par cette foule. Il va ainsi faire acte public d'être le Messie, celui que les juifs attendent. Mais sa réputation le précède. Les foules arrivent au devant de lui, surtout les enfants, déposant des branchages et des vêtements sur le chemin de celui qu'il considèrent comme leur roi, et agitant des branches pour le saluer et marquer leur liesse. D'ailleurs rameau vient du latin ramus, qui veut dire branche.
Mais au fait, des rameaux de quoi ?
Jérusalem est une ville d'altitude, située en Palestine, plus précisément au sud, en Judée. Il y a 2000 ans, le climat était le même bien sûr ! Un climat continental, à influence méditerranéenne, surtout pas les tropiques. Mais vue d'Europe occidentale aux premiers temps de l'église, Jérusalem est une contrée exotique. D'exotique à tropical il n'y a qu'un pas. Et voici les foules munies de palmes, c'est-à-dire de feuilles de palmiers, alors que les palmiers peinent à pousser ici, en tout cas plus que sur notre Côte d'azur ! On y rencontre plutôt des oliviers et des caroubiers.
Un autre point édifiant : la date. L'église a fixé la date en fonction de la pleine lune. Si l'on suppose que Pâques se déroule au printemps, ce qui est toujours controversé, il y a peu de chances que l'on agite des palmes desséchées par l'hiver devant Jésus. On peut donc penser qu'il s'agit d'oliviers, d'autant plus qu'il est probable que Jésus ait passé la nuit avec des amis au Mont des Oliviers, dernière protubérance avant d'entrer en ville, chemin sur lequel il va être accompagné.
Aujourd'hui, les chrétiens agitent et font bénir des branches vertes, pas si nombreuses en cette saison ! Pour reparler de la Côte d'azur, ce sont aujourd'hui de jolies petites palmes tressées qui sont bénies au jour des Rameaux, tradition importée de la Ligurie voisine, qui possédait une belle palmeraie venue des Croisades, et non pas coupés sur la promenade des anglais !
Partout ailleurs des rameaux d'olivier, de buis, de houx, d'if, voire de romarin ou de laurier, plantes méditerranéennes s'il en est. Au Moyen âge, on parlait plutôt d'olivier, considéré comme l'arbre solaire, symbole de vie et de lumière. Le buis, dont la réputation de longévité n'est pas à faire, est symbole de vie éternelle. On conservera ces rameaux dans la maison. Il vont jaunir mais se garder secs et on les brûlera traditionnellement le premier jour du Carême l'année suivante. Leurs cendres accompagneront alors la bénédiction des cierges.
Le temps de "Pâques fleuries" pour désigner le dimanche des Rameaux n'est plus vivace. Il est plutôt contradictoire, car on s'applique à utiliser des rameaux verts, symboles de vie, et même si la plupart des espèces citées sont bien en fleurs à cette époque, elles sont toujours discrètes… Mais à l'époque moyenâgeuse de l'introduction de la tradition en Europe, on utilisait des rameaux en fleurs, des arbres fruitiers par exemple. Jésus est entré dans Jérusalem. La semaine sainte, encore appelée "Grande semaine" dans nombre de contrées, commence…
Paque et paques, fêtes du passage
Pâque est un mot hébreu venant du grec paskha et qui signifie passage, "Pesah" en hébreu. Nous avons vu à propos des Rameaux à quoi correspond cette fête annuelle dans la tradition juive, appelée aussi Fête des pains sans levain.
Passage car les hébreux ont fui l'Egypte pour rejoindre la Terre Promise, en passant grâce à Dieu à pied sec la mer Rouge, mer qui pour eux est le symbole de la mort. Dans la Pâque l'idée est reprise, il s'agit de passer d'un état à un autre, du péché à la vie : en signe de volonté de purification, on s'enduisait de cendres, symbole de pénitence et de désir de purification chez les juifs. La Pâque marquait aussi le retour des semailles de printemps et la naissance des agneaux, le passage aussi de l'hiver au printemps.
La tradition chrétienne a repris cette notion pendant le temps du Carême, 40 jours de privation pour faire le vide en soi, se ressourcer, passage obligé vers la vie, la lumière. Encore la lumière, présente dans plus d'une fête, nous en parlons tout le temps ! Et le passage aussi de l'Ancien au Nouveau Testament.
Pâques, du latin Pascua, est pluriel depuis le XVIè siècle, époque à laquelle le singulier a désigné la fête juive et le pluriel la fête chrétienne.
La date de paques
C'est le concile de Nicée en 625 sous Saint Sylvestre Ier qui a fixé la fête chrétienne de Pâques. Uniquement en fonction de la lune et du soleil : "Le premier dimanche suivant la pleine lune tombant le jour de l'équinoxe de printemps (21 mars) ou celle d'après", ou plus simplement "14ème jour de la lune qui commence en mars". Pas clair ? Pas de panique, re-déroulons. Pâques a donc lieu au plus tôt le 22 mars. Sinon, si la pleine lune tombe la veille de l'équinoxe, il faudra attendre la suivante 29 jours plus tard, soit le 18 avril. Si c'est un dimanche, encore loupé, Pâques aura lieu au plus tard le 25 avril ! C'est important, car de là dépendront d'autres dates :
- Le Dimanche des Rameaux, dernier dimanche de Carême. Et le Mercredi des Cendres, début du Carême, 40 jours avant, donc le Mardi-Gras ! 40 jours, nombre mythique dans la Bible.
- L'Ascension, 40 jours après Pâques (encore !);
- La Pentecôte, 50 jours (comme son nom l'indique) après Pâques et 10 jours après l'Ascension ;
- La Trinité 7 jours après Pâques et la Fête-Dieu, le jeudi suivant.
Les symboles pascals
Pâques est la fête de la résurrection de Jésus chez les chrétiens, la vie est la plus forte. Tout comme pour les rameaux verts dont nous avons parlé aux Rameaux.
L'agneau pascal, animal sacrifié, dans les religions occidentales et orientales, victime qui expie nos péchés et permet le salut du monde. Car Jésus a partagé la Pâque avec ses amis les disciples, comme les hébreux avaient partagé l'agneau autour de Moise avant de fuir l'Egypte. En Grèce d'aujourd'hui, les chrétiens orthodoxes partagent aussi l'agneau grillé sur la place du village. Agneau aussi en Alsace, chevreau dans les régions où la chèvre a ses lettres de noblesse, le jeune animal est aussi symbole de vie nouvelle. Par ailleurs, les musulmans sacrifient aussi l'agneau à la fin du Ramadan.
Et l'oeuf dans tout ça ? C'est lui qui s'impose aujourd'hui. Retour à la vie, à la lumière, résurrection, l'oeuf est symbole de vie, d'autant plus que les poules sont prolifiques en cette saison. Après 40 jours de privations, l'oeuf est un bon moyen de se restaurer ! C'est le premier geste traditionnel en Irlande, dévorer un oeuf dès l'aube.
De tout temps, bien avant l'ère chrétienne, on a offert des oeufs décorés. Chez les égyptiens déjà (eh oui, encore eux !) et chez les gaulois les oeufs teints étaient symboles de renouveau printanier. Louis XV en offrait à sa cour. De nombreux peintres tel Watteau en décorèrent. De nos jours, les plus célèbres demeurent "les oeufs de Fabergé". Alexandre III passa commande à Peter Carl Fabergé d'un premier oeuf, qui fût suivi d'une quarantaine exécutés par ce bijoutier pour les tsars russes.
Même si l'oeuf n'a rien de biblique, il se décline aujourd'hui sur tous les tons. En chocolat, en sucre, cachés au jardin. De là toutes sortes de déclinaisons sous forme de cigognes alsaciennes, de poules, de lapins, tous remplis d'oeufs multicolores.
Le tout au son des cloches, en chocolat elles aussi, de retour de Rome pour annoncer la résurrection de Jésus, où d'après la légende elles sont allées se charger en oeufs de chocolat !
Les cloches sonnent à toutes volées le jour de Pâques… Dans les campagnes autrefois, les cloches sonnaient chaque jour de l'année, pour inviter les fidèles à assister à la messe. Sauf au moment de Pâques, où elles restent silencieuses du Jeudi au Samedi saint. Car Jésus est entré dans une ville en liesse, puis a partagé son dernier repas le Jeudi saint, a été jugé et est mort le Vendredi saint. Tristesse et recueillement, attente, et il est ressuscité le 3ème jour : les cloches sonnent pour fêter la résurrection de Jésus, marquant la fin de la veillée pascale !
Pâques ici & ailleurs
Pâques termine la Semaine sainte (on l'appelle d'ailleurs Grande semaine dans de nombreuses contrées). En Alsace, comme en Suisse par exemple, le Vendredi saint est chômé. Le lundi de Pâques correspond au 3è jour à partir du vendredi "il ressuscitera le troisième jour". En Poitou et dans le Sud-Ouest, l'ail vert (les jeunes feuilles justes sorties de terre) accompagne l'agneau de Poitou, le tout grillé. Dans le Sud-Ouest toujours, le "Buzet de Pâques" est une tradition de vinification en vin léger destiné à cette fête.
En Italie, on sème du blé dans une coquille d'oeuf le premier jour du Carême. Le blé en herbe aura rempli la coquille à Pâques, symbole de renouveau ! Il est de tradition de faire bénir la table garnie d'oeufs de Pâques en son centre.
Au Mexique, on en veut à Judas pour sa trahison, son effigie est brûlée.
La joie de Pâques
Pâques est non seulement une fête joyeuse, elle est aussi marquée par des événements heureux. De tout temps, le baptême des catéchumènes (adultes demandant à recevoir le baptême) s'est déroulé à Pâques.
L'expression "Faire ses Pâques" signifie communier, au moins une fois dans l'année, à cette date. C'est le cas depuis le concile de Latran au XIIIè siècle. Le "Temps de Pâques" varie pour chaque diocèse, une quinzaine de jours avant et après la fête de Pâques.
Origine de l'oeuf de Pâques
"Je vous donne des oeufs. L'œuf en sa forme ronde
Semble au Ciel, qui peut tout en ses bras enfermer,
Le feu, l'air et la terre, et l'humeur de la mer,
Et sans être compris comprend tout en ce monde."
Pierre de RONSARD
Depuis les temps païens, l'œuf fut le symbole de naissance, de fertilité, de renaissance et surtout le symbole indestructible de la bonté. D'autres sources affirment que l'œuf symbolise les quatre éléments de vie: la coquille représente la terre; la membrane, l'air; le blanc, l'eau; et le jaune, le feu.
De tout temps, bien avant l'ère chrétienne, on a offert des oeufs décorés. Chez les égyptiens déjà (eh oui, encore eux !) et chez les gaulois les oeufs teints étaient symboles de renouveau printanier.
On retrouve dans la comptabilité du palais royal d'Edwards I en Angleterre (en l'an 1200) la somme de 18 pences versée pour l'achat de 450 oeufs qui devaient être peints à la feuille d'or avant d'être distribués aux membres de la famille royale. Les oeufs recouverts d'or apportent la richesse à ceux qui les reçoivent.
Cette coutume "royale" se retrouve 500 ans plus tard à la cour du roi Louis XIV qui en fait une véritable institution. On se devait de lui apporter le plus gros oeuf pondu en son royaume durant la semaine sainte. Lui-même, le jour de Pâques, entouré de grandes corbeilles, distribuait en personne des oeufs peints à la feuille d'or à ses courtisans et au bon peuple.
Qu'il soit peint, gravé, incrusté, ajouré ou brodé, c'est le cadeau de la vie qui est transmis; un vœu de chance ou une marque d'affection, d'estime, d'amour.